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== Modèle économique de la Coopérative Tilt, les formes de RTE mises en œuvre et les logiques contributives ==
== <big><span style="color:#058355;">Modèle économique de la Coopérative Tilt, les formes de RTE mises en œuvre et les logiques contributives</span></big> ==
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''Atelier réalisé dans le cadre de l'université éphémère de TILT en Novembre 2022.''
''Atelier réalisé dans le cadre de l'université éphémère de TILT en Novembre 2022.''
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L’atelier a permis de partager l’état d’avancement relatif à la mise en œuvre du « modèle économique » de la Coopérative Tilt, et également de partager et de mettre en discussion des questionnements opérationnels pour aller plus loin. Des expériences « inspirantes » ont également nourri la réflexion collective. Par ailleurs, chaque participant fut appelé à être contributeur pour partager son expérience, son vécu ou son expertise.  
L’atelier a permis de partager l’état d’avancement relatif à la mise en œuvre du « modèle économique » de la Coopérative Tilt, et également de partager et de mettre en discussion des questionnements opérationnels pour aller plus loin. Des expériences « inspirantes » ont également nourri la réflexion collective. Par ailleurs, chaque participant fut appelé à être contributeur pour partager son expérience, son vécu ou son expertise.  
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Que recouvre la notion de « modèle économique » ? En référence aux travaux de l[https://www.ieefc.eu/ ’Institut Européen de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération]  et du [https://www.clubnoe.org/ Club Noé en Région Hauts-de-France], il semble important de bien distinguer deux grandes dimensions du modèle économique d’une entreprise : une '''dimension « réelle »''' du modèle qui renvoie au processus de création et de production de la valeur et de son appropriation par un ensemble de bénéficiaires : clients, usagers ; Et, une '''dimension « monétaire »''' qui renvoie au processus de capture de la valeur sous forme monétaire. Autrement dit, il importe d’élargir la vision de tout ce qui est produit « réellement » par l’entreprise. D’ailleurs, dans une perspective de soutenabilité, le modèle économique de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération (EFC) appelle l’entreprise à produire des richesses avec moins de ressources matérielles et plus de ressources « immatérielles » (compétences, engagement, confiance, coopérations...).  
Que recouvre la notion de « modèle économique » ? En référence aux travaux de l[https://www.ieefc.eu/ ’Institut Européen de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération]  et du [https://www.clubnoe.org/ Club Noé en Région Hauts-de-France], il semble important de bien distinguer deux grandes dimensions du modèle économique d’une entreprise : une '''dimension « réelle »''' du modèle qui renvoie au processus de création et de production de la valeur et de son appropriation par un ensemble de bénéficiaires : clients, usagers ; Et, une '''dimension « monétaire »''' qui renvoie au processus de capture de la valeur sous forme monétaire. Autrement dit, il importe d’élargir la vision de tout ce qui est produit « réellement » par l’entreprise. D’ailleurs, dans une perspective de soutenabilité, le modèle économique de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération (EFC) appelle l’entreprise à produire des richesses avec moins de ressources matérielles et plus de ressources « immatérielles » (compétences, engagement, confiance, coopérations...).  
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La « proposition de valeur » et le cadre d’intervention stratégique de l’entreprise – la raison d’être et d’agir de l’entreprise - constituent donc le point de départ, pour ensuite clarifier et caractériser la manière d’organiser le travail, de prendre des décisions, de répondre à des problématiques/besoins, et de construire la rentabilité de l’activité.  
La « proposition de valeur » et le cadre d’intervention stratégique de l’entreprise – la raison d’être et d’agir de l’entreprise - constituent donc le point de départ, pour ensuite clarifier et caractériser la manière d’organiser le travail, de prendre des décisions, de répondre à des problématiques/besoins, et de construire la rentabilité de l’activité.  
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=== <big><span style="color:white;background-color:#058355;">- Raison d’être et d’agir de Tilt à l’aune de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération -</span></big> ===
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=== Raison d’être et d’agir de Tilt à l’aune de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération ===
Pour tester le « modèle RTE/CTE » conceptualisé par Sophie Swaton, l’expérimentation en cours en Hauts-de-France prend forme au travers d’un cadre juridique bien spécifique : celui d’une '''Société Coopérative d’Activités et d’Emploi d’Intérêt Collectif''' (SCIC-CAE).  
Pour tester le « modèle RTE/CTE » conceptualisé par Sophie Swaton, l’expérimentation en cours en Hauts-de-France prend forme au travers d’un cadre juridique bien spécifique : celui d’une '''Société Coopérative d’Activités et d’Emploi d’Intérêt Collectif''' (SCIC-CAE).  
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A l’instar des Coopératives d’Activités et d’Emplois (Loi ESS de 2014), Tilt a pour fonction d’accompagner à l’entrepreneuriat. Toutefois sa spécificité première est d’accompagner à l’entrepreneuriat écologique et solidaire tout en cherchant à prendre en charge la question du revenu et des formes de solidarité à travers la mise en place de « Revenus de Transition Écologique ». En outre, la Coopérative Tilt a mis au cœur de son projet l’expérimentation d’un nouveau modèle économique d’entreprise en lien avec la transition écologique et économique des territoires dans lesquels elle intervient plus directement.
A l’instar des Coopératives d’Activités et d’Emplois (Loi ESS de 2014), Tilt a pour fonction d’accompagner à l’entrepreneuriat. Toutefois sa spécificité première est d’accompagner à l’entrepreneuriat écologique et solidaire tout en cherchant à prendre en charge la question du revenu et des formes de solidarité à travers la mise en place de « Revenus de Transition Écologique ». En outre, la Coopérative Tilt a mis au cœur de son projet l’expérimentation d’un nouveau modèle économique d’entreprise en lien avec la transition écologique et économique des territoires dans lesquels elle intervient plus directement.
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Sa fonction principale réside ainsi dans le conseil et l’accompagnement à l’entrepreneuriat écologique. Dans les faits, l’accompagnement est orienté sur de (nouveaux) métiers de la transition. Comme la cyclo-logistique, les activités de réduction à la source des déchets ménagers, le conseil/facilitation pour renforcer les dynamiques citoyennes locales de transition, l’artisanat écologique, etc. Certains métiers s’inventent. Les activités et leur modèle économique se construisent « en marchant ». L’accompagnement durant le test d’activité n’est donc pas « formaté ». Il cherche à s’adapter à la situation de la personne et du projet, et à leurs contraintes. La rentabilité de l’activité économique est aussi à construire, et nécessite parfois du temps.
Sa fonction principale réside ainsi dans le conseil et l’accompagnement à l’entrepreneuriat écologique. Dans les faits, l’accompagnement est orienté sur de (nouveaux) métiers de la transition. Comme la cyclo-logistique, les activités de réduction à la source des déchets ménagers, le conseil/facilitation pour renforcer les dynamiques citoyennes locales de transition, l’artisanat écologique, etc. Certains métiers s’inventent. Les activités et leur modèle économique se construisent « en marchant ». L’accompagnement durant le test d’activité n’est donc pas « formaté ». Il cherche à s’adapter à la situation de la personne et du projet, et à leurs contraintes. La rentabilité de l’activité économique est aussi à construire, et nécessite parfois du temps.


En outre, le leitmotiv de Tilt est de s’adresser à TOUTE personne - éloignée ou non de l’entrepreneuriat, parfois en situation de conversion professionnelle ou en insertion. Le but est de rechercher l’épanouissement de l’individu et de renforcer l’engagement de chacun en faveur d’une transition écologique via la quête de sens dans le travail. Ce positionnement stratégique appelle d’ailleurs la Coopérative à nouer des partenariats techniques et financiers ad hoc ; à l’instar du projet d’insertion par l’entrepreneuriat mis en œuvre avec l’Association La Petite Pierre à Coudekerque-Branche (Cf. visite de terrain « Label Epicerie).  
En outre, le leitmotiv de Tilt est de s’adresser à TOUTE personne - éloignée ou non de l’entrepreneuriat, parfois en situation de conversion professionnelle ou en insertion. Le but est de rechercher l’épanouissement de l’individu et de renforcer l’engagement de chacun en faveur d’une transition écologique via la quête de sens dans le travail. Ce positionnement stratégique appelle d’ailleurs la Coopérative à nouer des partenariats techniques et financiers ad hoc ; à l’instar du projet d’insertion par l’entrepreneuriat mis en œuvre avec l’Association La Petite Pierre à Coudekerque-Branche (Cf. visite de terrain « Label Epicerie).  


Enfin, dernier élément saillant du positionnement stratégique de la Coopérative : l’ambition de contribuer aux projets territoriaux de transition écologique et à la transition économique locale. Cela peut se traduire par l’accompagnement de projets d’activités contribuant au développement de circuits économiques de proximité (activités de restauration et traiteurs), ou réponse à des besoins sociaux locaux (mobilité, alimentation…).
Enfin, dernier élément saillant du positionnement stratégique de la Coopérative : l’ambition de contribuer aux projets territoriaux de transition écologique et à la transition économique locale. Cela peut se traduire par l’accompagnement de projets d’activités contribuant au développement de circuits économiques de proximité (activités de restauration et traiteurs), ou réponse à des besoins sociaux locaux (mobilité, alimentation…).


Toutes ces caractéristiques sont les éléments constitutifs du projet économique et politique, d’intérêt collectif, de la Coopérative. Une Charte de Valeurs explicite d’ailleurs la visée transformatrice recherchée par la Coopérative et ses entrepreneurs.
Toutes ces caractéristiques sont les éléments constitutifs du projet économique et politique, d’intérêt collectif, de la Coopérative. Une Charte de Valeurs explicite d’ailleurs la visée transformatrice recherchée par la Coopérative et ses entrepreneurs.
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=== <big><span style="color:white;background-color:#058355;">- Contribution coopérative et formes de RTE mises en œuvre -</span></big> ===
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=== Contribution coopérative et formes de RTE mises en œuvre ===
Le modèle économique et financier de la Coopérative Tilt repose - tout comme son modèle de gouvernance à la fois Publique-Privée-Entrepreneur.es – sur des ressources financières « croisées » : des subventions publiques, des aides privées, de l’auto-financement via la contribution coopérative.  
Le modèle économique et financier de la Coopérative Tilt repose - tout comme son modèle de gouvernance à la fois Publique-Privée-Entrepreneur.es – sur des ressources financières « croisées » : des subventions publiques, des aides privées, de l’auto-financement via la contribution coopérative.  


Ce modèle éprouvé par d’autres coopératives d’activités et d’emplois en France n’est pas une nouveauté. Les CAE s’autofinancent via une « contribution coopérative ». Cette contribution coopérative est une sorte « d’impôt » prélevé chez Tilt sur la marge brute des activités de chaque entrepreneur. Comme l’exige le fonctionnement des CAE, le pourcentage de la contribution coopérative est voté tous les ans en AG.  
Ce modèle éprouvé par d’autres coopératives d’activités et d’emplois en France n’est pas une nouveauté. Les CAE s’autofinancent via une « contribution coopérative ». Cette contribution coopérative est une sorte « d’impôt » prélevé chez Tilt sur la marge brute des activités de chaque entrepreneur. Comme l’exige le fonctionnement des CAE, le pourcentage de la contribution coopérative est voté tous les ans en AG.  


Durant les premières années de décollage de la Coopérative Tilt, la part de la contribution coopérative restera relativement faible. D’ici 5 à 6 ans, c’est un effet ciseaux qui est recherché : la part de l’auto- financement (de la contribution coopérative) dépassant la part des aides publiques et privés.
Durant les premières années de décollage de la Coopérative Tilt, la part de la contribution coopérative restera relativement faible. D’ici 5 à 6 ans, c’est un effet ciseaux qui est recherché : la part de l’auto- financement (de la contribution coopérative) dépassant la part des aides publiques et privés.


Dans son approche spécifique, Tilt cherche également dans le cadre de son accompagnement à répondre aux besoins de financement des entrepreneurs, et s’intéresse volontairement aux conditions de subsistance de ces derniers. Dans l’approche originale et originelle de Sophie Swaton, le RTE est un outil pour lever les freins financiers de départ, des moyens pour renforcer les liens de solidarité dans la construction d’un revenu de subsistance. Eu égard les besoins réels des premiers porteurs de projets accueillis au sein de Tilt, au cas par cas, trois formes de RTE a été mis en place depuis ces 2 premières années :  
Dans son approche spécifique, Tilt cherche également dans le cadre de son accompagnement à répondre aux besoins de financement des entrepreneurs, et s’intéresse volontairement aux conditions de subsistance de ces derniers. Dans l’approche originale et originelle de Sophie Swaton, le RTE est un outil pour lever les freins financiers de départ, des moyens pour renforcer les liens de solidarité dans la construction d’un revenu de subsistance. Eu égard les besoins réels des premiers porteurs de projets accueillis au sein de Tilt, au cas par cas, trois formes de RTE a été mis en place depuis ces 2 premières années :  


* Un RTE « Investissement ». Il permet concrètement des avances de trésorerie auprès des entrepreneurs pour assurer les premiers investissements dans leurs outils de production.  
 
* Un RTE « Formation » pour couvrir des frais de formations « métier » ou de qualification indispensables au développement d’une activité et qui ne seraient pas couverts par ailleurs.  
* Un '''RTE « Investissement »'''. Il permet concrètement des avances de trésorerie auprès des entrepreneurs pour assurer les premiers investissements dans leurs outils de production.  
* Un RTE « garantie » de salaire permis par le « Contrat d’Entrepreneur-salarié » : contrat de travail en CDI contractualisé entre un entrepreneur et la Coopérative. Très modestement, aujourd’hui, la part fixe de salaire est fixé à 250 euros par mois.  
* Un '''RTE « Formation »''' pour couvrir des frais de formations « métier » ou de qualification indispensables au développement d’une activité et qui ne seraient pas couverts par ailleurs.  
* Un '''RTE « garantie »''' de salaire permis par le « Contrat d’Entrepreneur-salarié » : contrat de travail en CDI contractualisé entre un entrepreneur et la Coopérative. Très modestement, aujourd’hui, la part fixe de salaire est fixé à 250 euros par mois.  
 


En outre, depuis 2021, un « budget contributif » est également en test au sein de la Coopérative. Les effets sont multiples : mobiliser les compétences du collectif d’entrepreneurs au service de la Coopérative et/ou de ses entrepreneurs, renforcer l’engagement de chacun dans le collectif, soutenir le développement du chiffre d’affaires des entrepreneurs par l’achat « interne » de prestations de services.  
En outre, depuis 2021, un « budget contributif » est également en test au sein de la Coopérative. Les effets sont multiples : mobiliser les compétences du collectif d’entrepreneurs au service de la Coopérative et/ou de ses entrepreneurs, renforcer l’engagement de chacun dans le collectif, soutenir le développement du chiffre d’affaires des entrepreneurs par l’achat « interne » de prestations de services.  


Soulignons que le partenariat avec deux Clubs Cigales du Dunkerquois (qui a conduit à leur entrée au sociétariat de la SCIC en 2021) a été un accélérateur de la mise en œuvre des RTE « Investissement » et « formation ». Les partenariats financiers et techniques sont en effet clefs dans la construction de l’ingénierie financière des RTE actuellement en test. Cette ingénierie est étroitement liée à la viabilité du modèle économique des activités des entrepreneurs et à celle de la Coopérative plus globalement. Les partenariats financiers sont dès lors déterminants pour « laisser du temps » d’apprentissage et de test d’activité tant pour les entrepreneurs que pour la Coopérative en tant que telle.  
Soulignons que le partenariat avec deux Clubs Cigales du Dunkerquois (qui a conduit à leur entrée au sociétariat de la SCIC en 2021) a été un accélérateur de la mise en œuvre des RTE « Investissement » et « formation ». Les partenariats financiers et techniques sont en effet clefs dans la construction de l’ingénierie financière des RTE actuellement en test. Cette ingénierie est étroitement liée à la viabilité du modèle économique des activités des entrepreneurs et à celle de la Coopérative plus globalement. Les partenariats financiers sont dès lors déterminants pour « laisser du temps » d’apprentissage et de test d’activité tant pour les entrepreneurs que pour la Coopérative en tant que telle.  


Une réflexion sur la mise en œuvre d’une sorte de « fonds d’investissement et de mutuelle » s’engage tout juste au sein de la Coopérative et du Réseau Zoein France plus largement. Il s’agit de faire porter le moins de risques possibles aux Coopératives de Transition Ecologique dans le cadre des investissements (matériels ou immatérielles) nécessaires aux porteurs de projets, mais aussi de permettre la mise en place d’un dispositif de protection et de solidarité (en particulier au niveau des rémunérations) pour les entrepreneurs et autres porteurs de projets.  
Une réflexion sur la mise en œuvre d’une sorte de « fonds d’investissement et de mutuelle » s’engage tout juste au sein de la Coopérative et du Réseau Zoein France plus largement. Il s’agit de faire porter le moins de risques possibles aux Coopératives de Transition Ecologique dans le cadre des investissements (matériels ou immatérielles) nécessaires aux porteurs de projets, mais aussi de permettre la mise en place d’un dispositif de protection et de solidarité (en particulier au niveau des rémunérations) pour les entrepreneurs et autres porteurs de projets.  
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=== <big><span style="color:white;background-color:#058355;">- Tensions et limites du modèle de Tilt -</span></big> ===
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=== Tensions et limites du modèle de Tilt ===
Plusieurs tensions ou limites du modèle économique et de financement de Tilt ont été mises en exergue :
Plusieurs tensions ou limites du modèle économique et de financement de Tilt ont été mises en exergue :


* La capacité d’autofinancement de la Coopérative est très liée à la contribution contributive, donc au chiffre d’affaires des entrepreneurs. Or, certaines activités ont certes des effets utiles (environnementaux et/ou sociaux), mais, elles ne sont pas toutes rentables à court terme, ou leur modèle économique est à construire, et cela nécessite du temps. Autrement dit, comment financer les (formes de) RTE ?
* La capacité d’autofinancement de la Coopérative est très liée à la contribution contributive, donc au chiffre d’affaires des entrepreneurs. Or, certaines activités ont certes des effets utiles (environnementaux et/ou sociaux), mais, elles ne sont pas toutes rentables à court terme, ou leur modèle économique est à construire, et cela nécessite du temps. Autrement dit, comment financer les (formes de) RTE ?


* Certains financements publics sont fortement orientés dans une approche quantitative : plus il y a d’entrepreneurs en test d’activité, plus il y a de financements. Comment concilier qualité de l’accompagnement, le « sur-mesure » et un « temps long », et (toujours) plus d’entrepreneurs ? Il y a d’ailleurs un risque d’orienter fortement les objectifs de développement de la Coopérative sur un objectif de croissance du nombre d’entrepreneurs à intégrer au sein de Tilt. Un effet de seuil et un « bon dimensionnement » en termes de nombre d’entrepreneurs au sein de Tilt restent à apprécier et à anticiper.
* Certains financements publics sont fortement orientés dans une approche quantitative : plus il y a d’entrepreneurs en test d’activité, plus il y a de financements. Comment concilier qualité de l’accompagnement, le « sur-mesure » et un « temps long », et (toujours) plus d’entrepreneurs ? Il y a d’ailleurs un risque d’orienter fortement les objectifs de développement de la Coopérative sur un objectif de croissance du nombre d’entrepreneurs à intégrer au sein de Tilt. Un effet de seuil et un « bon dimensionnement » en termes de nombre d’entrepreneurs au sein de Tilt restent à apprécier et à anticiper.


* La qualité des relations et des coopérations avec les acteurs locaux - associatifs, de l’insertion, collectivités locales, entreprises – sont assez déterminantes dans le modèle de la Coopérative Tilt. L’animation d’un dialogue territorial et le développement d’écosystèmes coopératives/productifs locaux sont au cœur du modèle économique et financier de la Coopérative Tilt. Le développement d’un ensemble de ressources immatérielles - la confiance entre les acteurs locaux, la mobilisation de compétences diverses, les coopérations techniques et financières, etc – est chronophage et constitue en tant que tel un « investissement » pour la Coopérative. A ce propos, le modèle de gouvernance de la Coopérative est appelé à évoluer pour intégrer des projets collectifs en vue aussi de créer « ensemble » et partager la « valeur territoriale » coproduite par Tilt, ses entrepreneurs et ses partenaires.
* La qualité des relations et des coopérations avec les acteurs locaux - associatifs, de l’insertion, collectivités locales, entreprises – sont assez déterminantes dans le modèle de la Coopérative Tilt. L’animation d’un dialogue territorial et le développement d’écosystèmes coopératives/productifs locaux sont au cœur du modèle économique et financier de la Coopérative Tilt. Le développement d’un ensemble de ressources immatérielles - la confiance entre les acteurs locaux, la mobilisation de compétences diverses, les coopérations techniques et financières, etc – est chronophage et constitue en tant que tel un « investissement » pour la Coopérative. A ce propos, le modèle de gouvernance de la Coopérative est appelé à évoluer pour intégrer des projets collectifs en vue aussi de créer « ensemble » et partager la « valeur territoriale » coproduite par Tilt, ses entrepreneurs et ses partenaires.
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=== Pistes de travail et de réflexion collective issues de l’atelier : ===
=== <big><span style="color:white;background-color:#058355;">- Pistes de travail et de réflexion collective issues de l’atelier : -</span></big> ===
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* Le modèle économique de Tilt, à moyen terme, pourrait reposer sur son utilité sociale/collective à l’échelle territoriale. Toutefois, cela nécessite d’identifier tous ces effets ou utilités sociales ou collectives, et de les valoriser ou les faire financer. Autrement dit, il s’agit de faire financer ces services (directs ou indirects) tant par les acteurs publics que privés : « il faut démonter l’utilité publique de Tilt, de son accompagnement, pour trouver le financement des RTE ».
* Le modèle économique de Tilt, à moyen terme, pourrait reposer sur son utilité sociale/collective à l’échelle territoriale. Toutefois, cela nécessite d’identifier tous ces effets ou utilités sociales ou collectives, et de les valoriser ou les faire financer. Autrement dit, il s’agit de faire financer ces services (directs ou indirects) tant par les acteurs publics que privés : « il faut démonter l’utilité publique de Tilt, de son accompagnement, pour trouver le financement des RTE ».


* Le modèle de Tilt semble se rapprocher de celui du « Contrat à Impact Social » (CIS). Ce dernier pourrait-il inspirer le modèle de Tilt ? Deux principales vigilances ont été mises en exergue : la « valeur » créée n’est pas que monétaire. Il est nécessaire d’avoir une vision élargie de la valeur / des valeurs (co)produites par la Coopérative. La triple comptabilité est certainement une piste intéressante à cet égard. En outre, le modèle du CIS suppose également un cadre d’intervention (pré)défini avec des « réponses » à des besoins clairement identifiés. Or, le modèle de la CTE/RTE se construit en faisant, dans une logique d’effectuation et de « recherche-action » ; ce qui n’est pas complétement en phase avec l’approche « standardisée » du CIS.  
* Le modèle de Tilt semble se rapprocher de celui du « Contrat à Impact Social » (CIS). Ce dernier pourrait-il inspirer le modèle de Tilt ? Deux principales vigilances ont été mises en exergue : la « valeur » créée n’est pas que monétaire. Il est nécessaire d’avoir une vision élargie de la valeur / des valeurs (co)produites par la Coopérative. La triple comptabilité est certainement une piste intéressante à cet égard. En outre, le modèle du CIS suppose également un cadre d’intervention (pré)défini avec des « réponses » à des besoins clairement identifiés. Or, le modèle de la CTE/RTE se construit en faisant, dans une logique d’effectuation et de « recherche-action » ; ce qui n’est pas complétement en phase avec l’approche « standardisée » du CIS.  


* Le chiffre d’affaires, c’est bien, mais ce ne n’est pas suffisant ! « Tout ce qui compte ne se dénombre pas et/ou ne se traduit pas en euros. Plus encore, le travail ne se résume pas à une production qui sera vendue/valorisée ». Autrement dit, que produit réellement Tilt ? Quels effets utiles produits l’accompagnement de Tilt ? L’ensemble des acteurs mobilisés autour du projet économique et politique de Tilt - autrement dit « l’écosystème de Tilt - constitue la ressource première de la Coopérative, de son modèle économique et celui des activités des entrepreneurs. « L’écosystème de Tilt » est à placer au cœur du modèle de Tilt et de son accompagnement.
* Le chiffre d’affaires, c’est bien, mais ce ne n’est pas suffisant ! « Tout ce qui compte ne se dénombre pas et/ou ne se traduit pas en euros. Plus encore, le travail ne se résume pas à une production qui sera vendue/valorisée ». Autrement dit, que produit réellement Tilt ? Quels effets utiles produits l’accompagnement de Tilt ? L’ensemble des acteurs mobilisés autour du projet économique et politique de Tilt - autrement dit « l’écosystème de Tilt - constitue la ressource première de la Coopérative, de son modèle économique et celui des activités des entrepreneurs. « L’écosystème de Tilt » est à placer au cœur du modèle de Tilt et de son accompagnement.


* La « richesse » de la Coopérative est avant tout ses entrepreneurs, leurs compétences, leur capacité à faire, en particulier à « faire ensemble ». Dans quelle mesure la coopérative booste le développement des compétences et la mutualisation des ressources au sein du Collectif, renforce et déploie l’écosystème de la Coopérative ? Il y a un enjeu fort de renforcer l’engagement des entrepreneurs au sein de Tilt (et de son projet économique et politique) et de favoriser le partage de ressources, le développement des coopérations et des collaborations, de faciliter le travail ensemble dans le but de concrétiser une transition écologique. Tilt a donc un rôle clef « d’accélérateur de coopérations et de collaborations » à l’échelle du collectif d’entrepreneurs et du/des territoires.  
* La « richesse » de la Coopérative est avant tout ses entrepreneurs, leurs compétences, leur capacité à faire, en particulier à « faire ensemble ». Dans quelle mesure la coopérative booste le développement des compétences et la mutualisation des ressources au sein du Collectif, renforce et déploie l’écosystème de la Coopérative ? Il y a un enjeu fort de renforcer l’engagement des entrepreneurs au sein de Tilt (et de son projet économique et politique) et de favoriser le partage de ressources, le développement des coopérations et des collaborations, de faciliter le travail ensemble dans le but de concrétiser une transition écologique. Tilt a donc un rôle clef « d’accélérateur de coopérations et de collaborations » à l’échelle du collectif d’entrepreneurs et du/des territoires.  
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*** Il s’agit de « miser sur l’abondance de contributeurs potentiels ». A l’instar de Wikipédia, cette logique est gagnante dans un contexte d’incertitudes ; Du moins, la CAE Optéos fut à la limite du dépôt de bilan il y a quelques années et l’engagement de toutes et tous a été salvateur pour la Coopérative.  
*** Il s’agit de « miser sur l’abondance de contributeurs potentiels ». A l’instar de Wikipédia, cette logique est gagnante dans un contexte d’incertitudes ; Du moins, la CAE Optéos fut à la limite du dépôt de bilan il y a quelques années et l’engagement de toutes et tous a été salvateur pour la Coopérative.  
*** La logique contributive appelle à « ouvrir la gouvernance » : créer et animer des espaces de travail, de régulation, d’échanges… : ce sont d’ailleurs des compétences et des moyens spécifiques à mobiliser au sein/par la Coopérative.  
*** La logique contributive appelle à « ouvrir la gouvernance » : créer et animer des espaces de travail, de régulation, d’échanges… : ce sont d’ailleurs des compétences et des moyens spécifiques à mobiliser au sein/par la Coopérative.  


* L’enjeu est de renforcer l’ancrage territorial de Tilt. La Coopérative intervient déjà « en proximité » avec des acteurs locaux sur le Dunkerquois (de l’insertion, collectivités locales : ex. du Pôle Mobilités notamment). La logique contributive pourrait ici aussi s’appliquer à l’échelle d’un territoire ?  
* L’enjeu est de renforcer l’ancrage territorial de Tilt. La Coopérative intervient déjà « en proximité » avec des acteurs locaux sur le Dunkerquois (de l’insertion, collectivités locales : ex. du Pôle Mobilités notamment). La logique contributive pourrait ici aussi s’appliquer à l’échelle d’un territoire ?  
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** Au-delà, le défi d’articuler modèle économique de la Coopérative et modèle de développement territorial appelle peut-être à tendre vers un modèle économique territorialisé de la Coopérative, à l’instar d’expérimentations d’écologie industrielle/territoriale.  
** Au-delà, le défi d’articuler modèle économique de la Coopérative et modèle de développement territorial appelle peut-être à tendre vers un modèle économique territorialisé de la Coopérative, à l’instar d’expérimentations d’écologie industrielle/territoriale.  
* Enfin, l’essaimage de Tilt sur d’autres territoires de la Région Hauts-de-France reste à creuser. L’analyse de la ChairESS sur les expérimentations Territoires Zéro Chômeurs (TZC), et, les formes d’essaimage des innovations sociales à l’échelle territoriale, sont éclairantes et inspirantes.  
* Enfin, l’essaimage de Tilt sur d’autres territoires de la Région Hauts-de-France reste à creuser. L’analyse de la ChairESS sur les expérimentations Territoires Zéro Chômeurs (TZC), et, les formes d’essaimage des innovations sociales à l’échelle territoriale, sont éclairantes et inspirantes.  


Amélie Lefebvre-Chombart soulignait ainsi l’importance d’un objectif commun et fédérateur : pour TZC, il s’agit de « l’emploi pour tous » sur un territoire donné.
Amélie Lefebvre-Chombart soulignait ainsi l’importance d’un objectif commun et fédérateur : pour TZC, il s’agit de « l’emploi pour tous » sur un territoire donné.


Les liens entre initiatives individuelles/citoyennes et les territoires ne se décrètent pas, mais se construisent sous différentes formes. La richesse de la dynamique territoriale repose sur la vivacité des maillages d’acteurs et leur capacité à activer les partenariats et les dynamiques collectives.
Les liens entre initiatives individuelles/citoyennes et les territoires ne se décrètent pas, mais se construisent sous différentes formes. La richesse de la dynamique territoriale repose sur la vivacité des maillages d’acteurs et leur capacité à activer les partenariats et les dynamiques collectives.


Dans le réel, la transversalité, la coopération territoriale et les enjeux politiques locaux sont parfois des freins rencontrés dans le cadre des expérimentations TZC.  
Dans le réel, la transversalité, la coopération territoriale et les enjeux politiques locaux sont parfois des freins rencontrés dans le cadre des expérimentations TZC.  


Par ailleurs, les difficultés à conduire des transformations territoriales restent nombreuses. Différents cas de figure des liens et rapports entre innovation sociale et territoire ont pu être observés : de l’ignorance réciproque entre les 2, en passant par la « récupération », le « décalage alternatif » (refus de récupération), à l’enrichissement mutuelle jusqu’à « l’hybridation » qui conduit à un nouveau système de normes et de valeurs (Source : Travaux de Landel et Koop).  
Par ailleurs, les difficultés à conduire des transformations territoriales restent nombreuses. Différents cas de figure des liens et rapports entre innovation sociale et territoire ont pu être observés : de l’ignorance réciproque entre les 2, en passant par la « récupération », le « décalage alternatif » (refus de récupération), à l’enrichissement mutuelle jusqu’à « l’hybridation » qui conduit à un nouveau système de normes et de valeurs (Source : Travaux de Landel et Koop).  
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=== <big><span style="color:white;background-color:#058355;">- Ressources pour aller plus loin : -</span></big> ===
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'''Intervenants :''' Jean-Christophe Lipovac, Association Zoein, Nathalie Bardaille, APES, Simon Ledez, Club Noé, Simon Sarazin, Optéos, Amélie Lefebvre et Nathalie Bernard, ChairESS.
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=== Ressources pour aller plus loin : ===
'''Ressources en lien avec l’intervention d’Amélie Lefebvre-Chombart :'''
Intervenants : Jean-Christophe Lipovac, Association Zoein, Nathalie Bardaille, APES, Simon Ledez, Club Noé, Simon Sarazin, Optéos, Amélie Lefebvre et Nathalie Bernard, ChairESS.


Ressources en lien avec l’intervention d’Amélie Lefebvre-Chombart :  
https://enp.chairess.org/  


<nowiki>https://enp.chairess.org/</nowiki>  
https://chairess.org/territoire-zero-chomeur-de-longue-duree/  


<nowiki>https://chairess.org/territoire-zero-chomeur-de-longue-duree/</nowiki>
https://chairess.org/wp-content/uploads/2018/10/PPT-séminaire-octobre.pptx


<nowiki>https://chairess.org/wp-content/uploads/2018/10/PPT-séminaire-octobre.pptx</nowiki>  
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01922002/file/Innovation%20sociale%20et%20territoires%20de%20montagne_Koop%20Landel%20Senil%20_2018.pdf
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<nowiki>https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01922002/file/Innovation%20sociale%20et%20territoires%20de%20montagne_Koop%20Landel%20Senil%20_2018.pdf</nowiki>


Ressources en lien avec l’intervention de Simon Sarazin :  
'''Ressources en lien avec l’intervention de Simon Sarazin :'''


<nowiki>http://documentation.opteos.fr/wiki/Retribution</nowiki>
http://documentation.opteos.fr/wiki/Retribution


<nowiki>https://movilab.org/wiki/Coremuneration</nowiki>
https://movilab.org/wiki/Coremuneration


<nowiki>https://victorecrement.xyz/Petit-manuel-du-budget-contributif-f15824ddab354afaa39542dadb187137</nowiki>
https://victorecrement.xyz/Petit-manuel-du-budget-contributif-f15824ddab354afaa39542dadb187137

Version actuelle datée du 29 juillet 2024 à 15:36

Modèle économique de la Coopérative Tilt, les formes de RTE mises en œuvre et les logiques contributives[modifier | modifier le wikicode]


Atelier réalisé dans le cadre de l'université éphémère de TILT en Novembre 2022.

L’atelier a permis de partager l’état d’avancement relatif à la mise en œuvre du « modèle économique » de la Coopérative Tilt, et également de partager et de mettre en discussion des questionnements opérationnels pour aller plus loin. Des expériences « inspirantes » ont également nourri la réflexion collective. Par ailleurs, chaque participant fut appelé à être contributeur pour partager son expérience, son vécu ou son expertise.

Que recouvre la notion de « modèle économique » ? En référence aux travaux de l’Institut Européen de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération et du Club Noé en Région Hauts-de-France, il semble important de bien distinguer deux grandes dimensions du modèle économique d’une entreprise : une dimension « réelle » du modèle qui renvoie au processus de création et de production de la valeur et de son appropriation par un ensemble de bénéficiaires : clients, usagers ; Et, une dimension « monétaire » qui renvoie au processus de capture de la valeur sous forme monétaire. Autrement dit, il importe d’élargir la vision de tout ce qui est produit « réellement » par l’entreprise. D’ailleurs, dans une perspective de soutenabilité, le modèle économique de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération (EFC) appelle l’entreprise à produire des richesses avec moins de ressources matérielles et plus de ressources « immatérielles » (compétences, engagement, confiance, coopérations...).


Dans une approche EFC, le modèle économique d’une entreprise peut être ainsi réfléchi et travaillé autour de 4 composantes principales : le modèle d’échange (ou « de la demande » qui renvoie à la prise en compte des attentes, de l’évaluation de la performance, etc.) ; le modèle de production (renvoie aux leviers de productivité, l’organisation du travail, etc.) ; le modèle de gouvernance (les relations entre parties prenantes et intéressées) ; et le modèle d’affaire (approche financière : captation de la valeur sous forme monétaire).


Comme le soulignait Nathalie Bardaille de l’APES en introduction de l’Atelier, ce cadre de réflexion et d’action autour des 4 composantes appelle surtout « à élargir la focale », à prendre en compte de manière plus globale/systémique les (inter)relations de l’entreprise à ses « parties prenantes » et au territoire. Dans une perspective de soutenabilité, il est en effet nécessaire d’élargir la question du modèle économique en cherchant à appréhender les « effets utiles » des modalités d’échanges, de production, de gouvernance, qui sont recherchés ou produits « réellement ». Il ne s’agit pas d’occulter la question de la rentabilité : le modèle d’affaire de l’entreprise. Mais, il est surtout nécessaire de ne pas/plus « s’enfermer » uniquement dans ce registre. Les 4 composantes sont à penser ensemble, en interaction/relation. C’est cette vision « systémique » qui va permettre d’approfondir la question de la rentabilité et des revenus qui peuvent être dégagés de l’activité économique.


La « proposition de valeur » et le cadre d’intervention stratégique de l’entreprise – la raison d’être et d’agir de l’entreprise - constituent donc le point de départ, pour ensuite clarifier et caractériser la manière d’organiser le travail, de prendre des décisions, de répondre à des problématiques/besoins, et de construire la rentabilité de l’activité.

- Raison d’être et d’agir de Tilt à l’aune de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération -[modifier | modifier le wikicode]


Pour tester le « modèle RTE/CTE » conceptualisé par Sophie Swaton, l’expérimentation en cours en Hauts-de-France prend forme au travers d’un cadre juridique bien spécifique : celui d’une Société Coopérative d’Activités et d’Emploi d’Intérêt Collectif (SCIC-CAE).

A l’instar des Coopératives d’Activités et d’Emplois (Loi ESS de 2014), Tilt a pour fonction d’accompagner à l’entrepreneuriat. Toutefois sa spécificité première est d’accompagner à l’entrepreneuriat écologique et solidaire tout en cherchant à prendre en charge la question du revenu et des formes de solidarité à travers la mise en place de « Revenus de Transition Écologique ». En outre, la Coopérative Tilt a mis au cœur de son projet l’expérimentation d’un nouveau modèle économique d’entreprise en lien avec la transition écologique et économique des territoires dans lesquels elle intervient plus directement.


La raison d’être et d’agir de Tilt se résume ainsi : activer les initiatives entrepreneuriales en faveur de la transition écologique et sociale en Hauts-de-France et contribuer à la transition économique des territoires.


Sa fonction principale réside ainsi dans le conseil et l’accompagnement à l’entrepreneuriat écologique. Dans les faits, l’accompagnement est orienté sur de (nouveaux) métiers de la transition. Comme la cyclo-logistique, les activités de réduction à la source des déchets ménagers, le conseil/facilitation pour renforcer les dynamiques citoyennes locales de transition, l’artisanat écologique, etc. Certains métiers s’inventent. Les activités et leur modèle économique se construisent « en marchant ». L’accompagnement durant le test d’activité n’est donc pas « formaté ». Il cherche à s’adapter à la situation de la personne et du projet, et à leurs contraintes. La rentabilité de l’activité économique est aussi à construire, et nécessite parfois du temps.


En outre, le leitmotiv de Tilt est de s’adresser à TOUTE personne - éloignée ou non de l’entrepreneuriat, parfois en situation de conversion professionnelle ou en insertion. Le but est de rechercher l’épanouissement de l’individu et de renforcer l’engagement de chacun en faveur d’une transition écologique via la quête de sens dans le travail. Ce positionnement stratégique appelle d’ailleurs la Coopérative à nouer des partenariats techniques et financiers ad hoc ; à l’instar du projet d’insertion par l’entrepreneuriat mis en œuvre avec l’Association La Petite Pierre à Coudekerque-Branche (Cf. visite de terrain « Label Epicerie).  


Enfin, dernier élément saillant du positionnement stratégique de la Coopérative : l’ambition de contribuer aux projets territoriaux de transition écologique et à la transition économique locale. Cela peut se traduire par l’accompagnement de projets d’activités contribuant au développement de circuits économiques de proximité (activités de restauration et traiteurs), ou réponse à des besoins sociaux locaux (mobilité, alimentation…).


Toutes ces caractéristiques sont les éléments constitutifs du projet économique et politique, d’intérêt collectif, de la Coopérative. Une Charte de Valeurs explicite d’ailleurs la visée transformatrice recherchée par la Coopérative et ses entrepreneurs.

- Contribution coopérative et formes de RTE mises en œuvre -[modifier | modifier le wikicode]


Le modèle économique et financier de la Coopérative Tilt repose - tout comme son modèle de gouvernance à la fois Publique-Privée-Entrepreneur.es – sur des ressources financières « croisées » : des subventions publiques, des aides privées, de l’auto-financement via la contribution coopérative.


Ce modèle éprouvé par d’autres coopératives d’activités et d’emplois en France n’est pas une nouveauté. Les CAE s’autofinancent via une « contribution coopérative ». Cette contribution coopérative est une sorte « d’impôt » prélevé chez Tilt sur la marge brute des activités de chaque entrepreneur. Comme l’exige le fonctionnement des CAE, le pourcentage de la contribution coopérative est voté tous les ans en AG.


Durant les premières années de décollage de la Coopérative Tilt, la part de la contribution coopérative restera relativement faible. D’ici 5 à 6 ans, c’est un effet ciseaux qui est recherché : la part de l’auto- financement (de la contribution coopérative) dépassant la part des aides publiques et privés.


Dans son approche spécifique, Tilt cherche également dans le cadre de son accompagnement à répondre aux besoins de financement des entrepreneurs, et s’intéresse volontairement aux conditions de subsistance de ces derniers. Dans l’approche originale et originelle de Sophie Swaton, le RTE est un outil pour lever les freins financiers de départ, des moyens pour renforcer les liens de solidarité dans la construction d’un revenu de subsistance. Eu égard les besoins réels des premiers porteurs de projets accueillis au sein de Tilt, au cas par cas, trois formes de RTE a été mis en place depuis ces 2 premières années :


  • Un RTE « Investissement ». Il permet concrètement des avances de trésorerie auprès des entrepreneurs pour assurer les premiers investissements dans leurs outils de production.
  • Un RTE « Formation » pour couvrir des frais de formations « métier » ou de qualification indispensables au développement d’une activité et qui ne seraient pas couverts par ailleurs.
  • Un RTE « garantie » de salaire permis par le « Contrat d’Entrepreneur-salarié » : contrat de travail en CDI contractualisé entre un entrepreneur et la Coopérative. Très modestement, aujourd’hui, la part fixe de salaire est fixé à 250 euros par mois.


En outre, depuis 2021, un « budget contributif » est également en test au sein de la Coopérative. Les effets sont multiples : mobiliser les compétences du collectif d’entrepreneurs au service de la Coopérative et/ou de ses entrepreneurs, renforcer l’engagement de chacun dans le collectif, soutenir le développement du chiffre d’affaires des entrepreneurs par l’achat « interne » de prestations de services.


Soulignons que le partenariat avec deux Clubs Cigales du Dunkerquois (qui a conduit à leur entrée au sociétariat de la SCIC en 2021) a été un accélérateur de la mise en œuvre des RTE « Investissement » et « formation ». Les partenariats financiers et techniques sont en effet clefs dans la construction de l’ingénierie financière des RTE actuellement en test. Cette ingénierie est étroitement liée à la viabilité du modèle économique des activités des entrepreneurs et à celle de la Coopérative plus globalement. Les partenariats financiers sont dès lors déterminants pour « laisser du temps » d’apprentissage et de test d’activité tant pour les entrepreneurs que pour la Coopérative en tant que telle.


Une réflexion sur la mise en œuvre d’une sorte de « fonds d’investissement et de mutuelle » s’engage tout juste au sein de la Coopérative et du Réseau Zoein France plus largement. Il s’agit de faire porter le moins de risques possibles aux Coopératives de Transition Ecologique dans le cadre des investissements (matériels ou immatérielles) nécessaires aux porteurs de projets, mais aussi de permettre la mise en place d’un dispositif de protection et de solidarité (en particulier au niveau des rémunérations) pour les entrepreneurs et autres porteurs de projets.

- Tensions et limites du modèle de Tilt -[modifier | modifier le wikicode]


Plusieurs tensions ou limites du modèle économique et de financement de Tilt ont été mises en exergue :


  • La capacité d’autofinancement de la Coopérative est très liée à la contribution contributive, donc au chiffre d’affaires des entrepreneurs. Or, certaines activités ont certes des effets utiles (environnementaux et/ou sociaux), mais, elles ne sont pas toutes rentables à court terme, ou leur modèle économique est à construire, et cela nécessite du temps. Autrement dit, comment financer les (formes de) RTE ?


  • Certains financements publics sont fortement orientés dans une approche quantitative : plus il y a d’entrepreneurs en test d’activité, plus il y a de financements. Comment concilier qualité de l’accompagnement, le « sur-mesure » et un « temps long », et (toujours) plus d’entrepreneurs ? Il y a d’ailleurs un risque d’orienter fortement les objectifs de développement de la Coopérative sur un objectif de croissance du nombre d’entrepreneurs à intégrer au sein de Tilt. Un effet de seuil et un « bon dimensionnement » en termes de nombre d’entrepreneurs au sein de Tilt restent à apprécier et à anticiper.


  • La qualité des relations et des coopérations avec les acteurs locaux - associatifs, de l’insertion, collectivités locales, entreprises – sont assez déterminantes dans le modèle de la Coopérative Tilt. L’animation d’un dialogue territorial et le développement d’écosystèmes coopératives/productifs locaux sont au cœur du modèle économique et financier de la Coopérative Tilt. Le développement d’un ensemble de ressources immatérielles - la confiance entre les acteurs locaux, la mobilisation de compétences diverses, les coopérations techniques et financières, etc – est chronophage et constitue en tant que tel un « investissement » pour la Coopérative. A ce propos, le modèle de gouvernance de la Coopérative est appelé à évoluer pour intégrer des projets collectifs en vue aussi de créer « ensemble » et partager la « valeur territoriale » coproduite par Tilt, ses entrepreneurs et ses partenaires.


- Pistes de travail et de réflexion collective issues de l’atelier : -[modifier | modifier le wikicode]


  • Le modèle économique de Tilt, à moyen terme, pourrait reposer sur son utilité sociale/collective à l’échelle territoriale. Toutefois, cela nécessite d’identifier tous ces effets ou utilités sociales ou collectives, et de les valoriser ou les faire financer. Autrement dit, il s’agit de faire financer ces services (directs ou indirects) tant par les acteurs publics que privés : « il faut démonter l’utilité publique de Tilt, de son accompagnement, pour trouver le financement des RTE ».


  • Le modèle de Tilt semble se rapprocher de celui du « Contrat à Impact Social » (CIS). Ce dernier pourrait-il inspirer le modèle de Tilt ? Deux principales vigilances ont été mises en exergue : la « valeur » créée n’est pas que monétaire. Il est nécessaire d’avoir une vision élargie de la valeur / des valeurs (co)produites par la Coopérative. La triple comptabilité est certainement une piste intéressante à cet égard. En outre, le modèle du CIS suppose également un cadre d’intervention (pré)défini avec des « réponses » à des besoins clairement identifiés. Or, le modèle de la CTE/RTE se construit en faisant, dans une logique d’effectuation et de « recherche-action » ; ce qui n’est pas complétement en phase avec l’approche « standardisée » du CIS.


  • Le chiffre d’affaires, c’est bien, mais ce ne n’est pas suffisant ! « Tout ce qui compte ne se dénombre pas et/ou ne se traduit pas en euros. Plus encore, le travail ne se résume pas à une production qui sera vendue/valorisée ». Autrement dit, que produit réellement Tilt ? Quels effets utiles produits l’accompagnement de Tilt ? L’ensemble des acteurs mobilisés autour du projet économique et politique de Tilt - autrement dit « l’écosystème de Tilt - constitue la ressource première de la Coopérative, de son modèle économique et celui des activités des entrepreneurs. « L’écosystème de Tilt » est à placer au cœur du modèle de Tilt et de son accompagnement.


  • La « richesse » de la Coopérative est avant tout ses entrepreneurs, leurs compétences, leur capacité à faire, en particulier à « faire ensemble ». Dans quelle mesure la coopérative booste le développement des compétences et la mutualisation des ressources au sein du Collectif, renforce et déploie l’écosystème de la Coopérative ? Il y a un enjeu fort de renforcer l’engagement des entrepreneurs au sein de Tilt (et de son projet économique et politique) et de favoriser le partage de ressources, le développement des coopérations et des collaborations, de faciliter le travail ensemble dans le but de concrétiser une transition écologique. Tilt a donc un rôle clef « d’accélérateur de coopérations et de collaborations » à l’échelle du collectif d’entrepreneurs et du/des territoires.
    • Pour favoriser le partage de compétences entre entrepreneurs, renforcer un collectif et ses compétences propres – éléments stratégiques du modèle économique de Tilt -: l’exemple du budget contributif d’Optéos est inspirant.
      • Pour Simon Sarazin (ancien dirigeant d’Optéos), il permet de faire travailler ensemble des entrepreneurs et de mobiliser leurs diverses compétences au service du collectif/de la coopérative. Une sorte de « salariat contributif » est ainsi expérimenté au sein d’Optéos.
      • Le budget contributif repose sur un principe de rémunération libre a posteriori.
      • Il s’agit de « miser sur l’abondance de contributeurs potentiels ». A l’instar de Wikipédia, cette logique est gagnante dans un contexte d’incertitudes ; Du moins, la CAE Optéos fut à la limite du dépôt de bilan il y a quelques années et l’engagement de toutes et tous a été salvateur pour la Coopérative.  
      • La logique contributive appelle à « ouvrir la gouvernance » : créer et animer des espaces de travail, de régulation, d’échanges… : ce sont d’ailleurs des compétences et des moyens spécifiques à mobiliser au sein/par la Coopérative.


  • L’enjeu est de renforcer l’ancrage territorial de Tilt. La Coopérative intervient déjà « en proximité » avec des acteurs locaux sur le Dunkerquois (de l’insertion, collectivités locales : ex. du Pôle Mobilités notamment). La logique contributive pourrait ici aussi s’appliquer à l’échelle d’un territoire ?
    • Le budget contributif de Tilt à l’instar du budget contributif d’Optéos peut d’une part permettre, « de pair à pair», le développement des activités des entrepreneurs. D’autre part, il pourrait également servir à développer des « écosystèmes coopératifs locaux » : donc, activer des « effets utiles » à l’échelle du/des territoires dans le(s)quel(s) les entrepreneurs et la Coopérative interviennent.
    • En outre, l’enjeu est aussi de dépasser les logiques de concurrence entre structures locales de l’accompagnement et de consolider des collectifs autour de projets locaux partagés : Réponse collective à des APP, logique de budget contributif territoriale, sont autant de pistes à creuser.
    • Au-delà, le défi d’articuler modèle économique de la Coopérative et modèle de développement territorial appelle peut-être à tendre vers un modèle économique territorialisé de la Coopérative, à l’instar d’expérimentations d’écologie industrielle/territoriale.
  • Enfin, l’essaimage de Tilt sur d’autres territoires de la Région Hauts-de-France reste à creuser. L’analyse de la ChairESS sur les expérimentations Territoires Zéro Chômeurs (TZC), et, les formes d’essaimage des innovations sociales à l’échelle territoriale, sont éclairantes et inspirantes.


Amélie Lefebvre-Chombart soulignait ainsi l’importance d’un objectif commun et fédérateur : pour TZC, il s’agit de « l’emploi pour tous » sur un territoire donné.


Les liens entre initiatives individuelles/citoyennes et les territoires ne se décrètent pas, mais se construisent sous différentes formes. La richesse de la dynamique territoriale repose sur la vivacité des maillages d’acteurs et leur capacité à activer les partenariats et les dynamiques collectives.


Dans le réel, la transversalité, la coopération territoriale et les enjeux politiques locaux sont parfois des freins rencontrés dans le cadre des expérimentations TZC.


Par ailleurs, les difficultés à conduire des transformations territoriales restent nombreuses. Différents cas de figure des liens et rapports entre innovation sociale et territoire ont pu être observés : de l’ignorance réciproque entre les 2, en passant par la « récupération », le « décalage alternatif » (refus de récupération), à l’enrichissement mutuelle jusqu’à « l’hybridation » qui conduit à un nouveau système de normes et de valeurs (Source : Travaux de Landel et Koop).  

- Ressources pour aller plus loin : -[modifier | modifier le wikicode]


Intervenants : Jean-Christophe Lipovac, Association Zoein, Nathalie Bardaille, APES, Simon Ledez, Club Noé, Simon Sarazin, Optéos, Amélie Lefebvre et Nathalie Bernard, ChairESS.


Ressources en lien avec l’intervention d’Amélie Lefebvre-Chombart :

https://enp.chairess.org/  

https://chairess.org/territoire-zero-chomeur-de-longue-duree/

https://chairess.org/wp-content/uploads/2018/10/PPT-séminaire-octobre.pptx

https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01922002/file/Innovation%20sociale%20et%20territoires%20de%20montagne_Koop%20Landel%20Senil%20_2018.pdf


Ressources en lien avec l’intervention de Simon Sarazin :

http://documentation.opteos.fr/wiki/Retribution

https://movilab.org/wiki/Coremuneration

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