Ce qui se fait ailleurs

De Zoein
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Territoires Zéro Chômeur de Longue Durée

Conjuguer RTE et TZCLD

Le réseau des territoires en route pour expérimenter le RTE souhaite apprendre de l'expérimentation TZCLD, et mieux évaluer la complémentarité des 2 initiatives dont les synergies apparaissent de plus en plus évidentes à mesure que les territoires avancent dans le RTE.

Les deux ont des points de départ très différents : la transition écologique qui tarde, pour le RTE, et la privation d'emploi de longue durée devenue endémique de notre société, pour TZCLD.

Les deux aboutissent à la création d'emplois « supplémentaires » par rapport au marché classique de l'emploi, marchand ou non. Les deux ne s'adressent pas forcément au même public.

Le but de ce document est de donner quelques éclairages sur cette complémentarité.

1.   Quelques points de différence entre ces 2 initiatives

A. Le cadre général

Principe de départ :

  • RTE : Rémunérer une personne pour un service rendu à la communauté par une activité vertueuse pour la sauvegarde de l'environnement et le bien-être social. Rémunérer le travail de sauvegarde des « communs »
  • TZCLD : Le travail est source de dignité. Le droit au travail est un droit inaliénable, inscrit dans le préambule de la constitution, qu'il s'agit de rendre effectif. Considérer le travail comme un « commun »


Le public visé  :

  • RTE : Tous les acteurs en phase de transition ou en passe de l'être, désirant passer à l'action, avec un projet combinant épanouissement personnel et impact sociétal positif
  • TZCLD : Les personnes privées durablement d'emploi satisfaisant (selon la loi > 1 an, > 6 mois résidence sur le territoire


But :

  • RTE : Accompagner des projets individuels participant à la transition écologique.
  • TZCLD : Fournir aux publics les plus éloignés de l'emploi des emplois de qualité, utiles au territoire,


Démarche individuelle / collective :

  • RTE : A la base de chaque RTE , il y a une initiative ou simplement une idée individuelle dont le développement se fera ensuite dans le collectif qu'est la CTE3, ou bien une idée issue d’une réflexion collective
  • TZCLD : l'EBE est un collectif. Chacun est invité à y amener ses idées, mais le développement de celles ci est dans un cadre collectif.

Vision sociale :

  • RTE : Créer un écosystème durable et résilient qui, partant des compétences des personnes, met en commun des savoirs faire et des connaissances au sein d'un réseau composé de citoyens, d'associations et d'entreprises
  • TZCLD : Eradiquer la privation d'emploi de longue durée, en mettant les talents des PPDE au service des territoires, et en permettant aux personnes concernées de retrouver leur dignité sociale au travers d'un emploi utile et adapté à leurs souhaits

Ecosystème :

  • RTE: Le RTE a vocation à encourager la création d’écosystèmes en marge de l'économie classique. Le cycle économique visé est local, encourageant l'économie de circuit court (monnaie locale, entraide,..
  • TZCLD : adapter l'économie : « classique ». C'est une activation de dépenses déjà réalisées de façon passive par la collectivité . L'idée est que le versement d'un vrai salaire évitera un certain nombre de ces dépenses, rendant l'opération financièrement neutre pour la collectivité7 .

Évolution à long terme du projet :

  • RTE : Liée à l’évolution de l’économie, de ses indicateurs de richesse, et à l’évolution de la comptabilité publique.
  • TZCLD : D'ici 2026, proposer un droit d'option sur l'ensemble du pays, permettant à tout territoire présentant un projet mature de mettre en œuvre un projet TZCLD

B. L'aspect financier

Ressources :

  • RTE : Le modèle économique est à construire par chaque expérimentation sur la base de subventions et/ou prestations correspondant à des services aux collectivités, et de prestations de services pour des entreprises privées, ainsi que de subventions de fondations et de mécénat
  • TZCLD : Le fonds d'expérimentation ETCLD conventionne l'EBE pour un versement de 18k€/an.ETP, pour la durée de l'expérimentation, attribué par l’Etat, + financement du Département à éclaircir

Aides sociales

  • RTE : Le RTE ne remplace aucune aide sociale et n’impacte pas le système actuel. Par contre, son cumul avec le RSA pendant un maximum de 300h/an est spécifique au département de l’Aude
  • TZCLD : Le salaire a vocation à remplacer les aides sociales de base (hors aides spécifiques à la situation individuelle)

Revenu principal :

  • RTE : Le principe du RTE s’accommode très bien du cumul de plusieurs revenus. Il est attribué à des membres de la coopérative ou des structures adhérentes, pour une durée modulable selon le contexte.
  • TZCLD : Le but est de verser un salaire qui est le revenu principal (et a priori unique) de la personne. L'idée est de garantir ce revenu à durée indéterminée.


Objectif du revenu :

  • RTE : Atteindre au moins le SMIC en revenu total. Le montant du RTE est dépendant de la situation de chacun, et de critères d' « urgence écologique » et sociale » fixés au sein de la CTE
  • TZCLD : SMIC


Monnaie :

  • RTE : Euros, monnaie locale, droit à la formation, temps d'entraide
  • TZCLD : Euros

C. L'encadrement du déploiement :

  • RTE : Par la fondation ZOEIN et son comité scientifique et le réseau RTE France
  • TZCLD : 2eme loi d'expérimentation votée le 30 novembre 2020, pour une durée de 5 ans. L'association nationale TZCLD assure la promotion et l'animation. Le fond ETCLD

D. La personne et son évolution

Statut de la personne :

  • RTE : Entrepreneur salarié adhérent de la Coopérative d'Activité et d 'Emploi si la CTE est une CAE, et statut variable pour une SCIC non CAE.
  • TZCLD : Salarié


Coopération :

  • RTE : L'adhésion à la CTE et sa gestion démocratique favorisent un sentiment d'appartenance et la coopération entre acteurs
  • TZCLD : Plus qu'une entreprise classique , l'EBE est un lieu de socialisation et de mise en commun des savoirs et des expériences. L'inclusivité est l'ADN du management.


Formation :

  • RTE : La CTE (en direct ou à travers ses sociétaires) a vocation à être le cadre des montées en compétences. Elle comporte un dispositif d'accompagnement des projets et de formation.
  • TZCLD : L'EBE a les possibilités et obligations de formation d'une entreprise classique. Des conditions spécifiques de formation devraient être précisées dans le cadre de la 2eme loi


Évolution à terme des individus

  • RTE : Pas de limitation de durée des contrats. Les activités devenant lucrative entrent dans le secteur marchand.
  • TZCLD : Les plus « adaptables » pourront chercher un emploi dans le secteur marchand, mais le principe est d'offrir les conditions d'un emploi pérenne au sein de l'EBE.

E. La gouvernance

Le cadre législatif

  • RTE : Aucun à ce jour, à définir grâce à l'expérimentation
  • TZCLD : Loi du 29 février 2016, étendue par celle de novembre 2020

Structure de gouvernance

  • RTE : Coopérative de Transition Ecologique
  • TZCLD : Comité Local pour l'Emploi

Structure opérationnelle

  • RTE : Coopérative de Transition Ecologique sous forme de SCIC
  • TZCLD : Entreprise à But d'Emploi

Les exigences de gouvernance

  • RTE : des principes (transversalité, inclusion), mais pas d’exigence autres que celles des SCIC, où cohabitent des habitants, des entreprises des experts et des collectivités
  • TZCLD : Très encadrée par la loi et ses décrets d’application. Le CLE est le pivot de la mise en œuvre et de la pérennité

Objectif

  • RTE : Il n'y a pas d'objectif quantitatif assumé, mais une recherche d’effet seuil pour un réel impact territorial
  • TZCLD : L'objectif est l'exhaustivité de l'offre d'emploi, mesurée par rapport aux personnes très éloignées de l'emploi : il s'agit d'éradiquer le chômage de longue durée.

F. L'inscription dans le territoire

Inscription dans le marché de l'emploi

  • RTE : 3ème voie entre « tout marché » et « tout état ». Aide à l’émergence de nouveaux métiers et à une nouvelle conception de la rémunération et donc de l’emploi et enfin de l’économie
  • TZCLD : Travaux « interstitiels » : non ou partiellement pris en charge par le marché de l'emploi sur le territoire donné.

L'expression du territoire

  • RTE : La CTE est le lieu de rencontre des acteurs du territoire impliqués dans la Transition Ecologique, et sert à amplifier et assurer la complémentarité et la cohérence des actions.      
  • TZCLD : Le CLE est le lieu de l'expression des forces vives du territoire, impactées par ou actrices du projet. En particulier il est le garant de l'atteinte de l'exhaustivité ainsi que de la supplémentarité des travaux (non concurrence)

Types de travaux

  • RTE : Les travaux entrant directement dans le cadre de la transition écologique et de l'adaptation de la société à celle-ci. On parle plus d’activités
  • TZCLD : Tous types de travaux, pas forcément à visée écologique

Non concurrence

  • RTE : Pas de consigne a priori, mais le souci de ne pas détruire les emplois existants. Plutôt de les faire évoluer
  • TZCLD : Clause de non concurrence impérative : avec le secteur marchand en particulier, mais aussi avec tous les emplois existants sur le territoire.

2. Les points de convergence du RTE et de TZCLD

A. La mobilisation territoriale

Les 2 initiatives doivent être appuyées par une collectivité territoriale. Celle ci peut correspondre à un découpage administratif (commune, communauté de communes) ou bien un découpage arbitraire basé en général sur le volontariat des élus, pourvu que le territoire défini ait une cohérence en terme de bassin de vie.

B. Un organisme local de tutelle

Les titulaires de RTE adhèrent à une Coopérative de Transition Ecologique (CTE). Celle-ci a 4 rôles clés :

  • valoriser financièrement les activités de transition écologique et sociale auprès des collectivités publiques et du privé
  • assurer les financements des RTE
  • assurer la formation de ses adhérents
  • accompagner les projets, notamment en mutualisant les moyens

L'EBE est étroitement liée à un Comité Local pour l'Emploi (CLE) dont elle est le bras armé : les objectifs de l'EBE sont opérationnels (liés à l'embauche, l'accompagnement, la fourniture de prestations). Le rôle du CLE est tactique et stratégique : ses objectifs sont l'exhaustivité et la veille à la supplémentarité réelle des emplois (non concurrence).

C. La solidarité de revenu

La mutualisation des activités

L'objectif de l'EBE est de créer des emplois. La rentabilité des activités n'entre pas en ligne de compte : l'équilibre financier n'est qu'une condition de la survie de l'EBE, en aucun cas un but en soi. Cela veut dire que des activités peuvent être très déficitaires si elles ont un intérêt en terme de création d'emploi. Elles seront compensées par d'autres activités plus profitables, ou par d'autres ressources à trouver. La CTE se distingue d'une pépinière d'entreprise par le fait qu'elle a un rôle de mise en commun des revenus, permettant une péréquation entre activités. « Il ne s'agit pas d'une logique de je prends j'ai droit, mais plutôt : je prends, je (me) réalise, je crée, je (me) forme, je redonne »

La rémunération est la contrepartie d'un travail Loin des initiatives de revenus universels, inconditionnels, de base, etc... RTE et TZCLD conditionnent le revenu à la fourniture d'un travail. Le débat critique sur l'inconditionnalité d'un revenu n'a pas sa place ici 13. Le parti pris des 2 initiatives est clairement de conditionner revenu et activité auquel on ajoutera l'obligation de réalité et d'utilité pour la société. On observera cependant une limitation pour TZCLD : le montant de référence est fixé de façon égalitaire au niveau du SMIC. On notera que certains EBE ont décidé de rompre cette égalité de 10% en faveur de quelques privés d'emploi prenant des responsabilités.

Il n'y a pas de montant de référence défini pour le RTE. En revanche on voit une forte tendance à envisager son versement, pour partie au moins, en monnaie locale. Cela renforce la notion de permacircularité, sous-jacente au concept de RTE

D. La formation

Elle fait partie intégrante des démarches. Au sein de l'EBE, un effort spécifique va être consacré à valoriser l’expérience des embauchés via une démarche de VAE. L'accent est toutefois mis sur la formation par les pairs au sein des activités. La formation fait partie d’un accompagnement qui permet entre autres le droit à l’erreur, inhérent à la notion d’expérimentation. Elle repose aussi sur la montée en compétences par le faire ensemble.

E. Construire autour de l'individu

La démocratie d'entreprise

Autant au sein de la CTE que de l'EBE, les individus sont intégrés dans la gestion et la définition du contenu et de l'emploi lui même. Il s'agit de construire autant la qualité du travail que l'activité elle- même.


La co-construction

Les emplois liés au RTE sont par définition co-construits avec les porteurs d’activités, puisque dans la plupart des cas les travaux sont suggérés par les salariés eux mêmes. C'est aussi le principe dans l'EBE, même si l’expérience montre que les futurs salariés de celle ci ont souvent de la peine à proposer par eux-mêmes des activités : lorsque l'on est dans la survie matérielle au quotidien, il est difficile de se projeter pour construire un projet professionnel. Le travail est plutôt considéré  comme une opportunité à saisir.

Cela conduit à avoir une démarche double : construire des emplois en partant des envies et idées d'activités présentées par les PPDE, devenant ainsi des « proposants », et en même temps recenser les besoins du territoire, non ou partiellement pourvus, permettant de générer des activités que l'on va proposer ensuite au sein de l'EBE

Il reste que, dans tous les cas, l'EBE s'engage à :

  • ne jamais « forcer » l'acceptation d'un travail allant contre les souhaits de la personne
  • organiser la co-construction des emplois, même si au départ l'activité a été suggérée par les clients potentiels de l'EBE. Cela illustre l’importance de bien faire la différence entre travail et emploi.


Faire évoluer relation de travail et place du travail dans la société

Autant l'EBE que la CTE ont vocation à être des lieux d'expérimentation de relations de travail renouvelées. L’expérience actuelle des 12 EBE existantes montre que ce sujet est crucial : de part leur histoire personnelle émaillée de difficultés et de rejets au sein de la société, les salariés d'une EBE présentent un cumul de difficultés d'ordre social et économique qui tendent à compliquer les relations inter-individuelles, et entre individus et organisations. Cela conduit à mettre en place des modes de management inclusifs axés sur la cohésion et la rencontre d’intérêt mutuel plutôt que sur l'autorité. L’expérience de TAE à Noisy le Grand montre depuis 15 ans que ce n'est pas simple, mais que c'est à la portée de toute direction d'entreprise motivée en ce sens.


Un emploi sur mesure

Il s'agit dans tous les cas de créer des emplois correspondant aux aspirations des salariés, notamment dans les conditions de travail : choix des horaires, envies personnelles quand aux taches prises en charge, participation active de chacun à l'organisation du travail lui-même. C'est notamment facilité par le caractère multi-activité des EBE : le foisonnement naturel d'activités multiples (en horaire et en charge) multiplie les scénarios possibles d'emploi du temps. Si cela peut compliquer l'ordonnancement de l'activité, cela permet en revanche d'adapter assez facilement l’activité aux contraintes d'horaire individuel des salariés. Cela suppose bien sur que ceux ci acceptent d'avoir des activés multiples, et que l'ordonnancement soit fait au niveau des salariés eux mêmes, en équipes de travail autonomes.

Il faut souligner que cette multi-activité au niveau des salariés représente pour ceux ci un encouragement à la formation, qui les amène à s'engager avec plaisir dans des activités qu'ils ne se soupçonnaient pas capables exécuter. Ainsi le témoignage de cette salariée de Moléon « je n’imaginais pas qu'un jour j'aurais du plaisir à faire des meubles en bois de palettes ».

Le RTE correspondant à une activité individuelle, est totalement construit sur mesure.

F. L'inscription dans le territoire

Des outils de la politique de l'emploi

Les deux initiatives sont des outils de politique publique : ils ont vocation à s'insérer parmi les autres outils existants (IAE, emplois aidés, formation,...). Ils n'ont pas vocation à les remplacer, mais à en être des compléments.

La mise en situation de coopération de tous les acteurs du territoire

Le CLE est lui l'organe de régulation du TZCLD. Sa composition, au delà des financeurs, est en partie cadrée par la loi de façon à y inclure collectivités, secteur associatif, acteurs de l'ESS, administrations, représentants des entreprises et bien sûr salariés. Son fonctionnement, condition pour l'habilitation du territoire, met tous ces acteurs en position de coopération active. Ce n'est pas l'une des moindres réussites de TZCLD.

G. Partir du terrain

A l'inverse des politiques de l'emploi classique qui sont descendantes, la particularité des deux initiatives est de partir des forces vives du territoire, à commencer par les personnes qui vont occuper ces emplois. Il s'agit de construire les futurs emplois à partir du terrain , en fonction du contexte local, et en respectant les désirs et talents des personnes impliquées. Peu de choses sont imposées  « d'en haut »,  les  administrations  ont  un       rôle de facilitateur, et en aucun cas de prescripteur. Les seules prescriptions viennent pour TZCLD du fond ETCLD chargé de conventionner les territoires selon un cahier des charges déclinant l'esprit de la loi d'habilitation. https://dares.travail-emploi.gouv.fr/sites/default/files/pdf/dares-resultats_depenses-en-faveur- emploi_2017.pdf

3. Combiner RTE et TZCLD de façon pratique

A. Proposer des outils d'aide à l'emploi

Les dépenses en faveur de l'emploi représentaient en 72 Md€ en 2017, auquel on peut ajouter 20 Md€ au titre des minima sociaux. C'est un panel de mesures, pour la plupart passives, très vaste, dans lesquelles RTE et TZCLD ont vocation à s'inscrire de façon active. Dans ce cadre, il ne s'agit surtout pas de rajouter de nouvelles dépenses, mais bien d'activer des dépenses qui seront subies de toute façon par la société. Il convient donc de s'assurer que TZCLD, mais pourquoi pas le RTE, s’inscrivent dans un parcours personnel à proposer aux personnes privées d'emploi volontaires. Celles ci pourraient alors s'orienter vers l'une ou l'autre des « solutions », selon son contexte et son histoire personnelle. En particulier il est difficile de ne pas mentionner l'Insertion par l'Activité Economique (IAE) comme outil majeur de la politique actuelle de retour vers l'emploi. RTE et TZCLD s'inscrivent en complément de l'IAE.


A ce point on doit aussi mentionner un souci évoqué autant dans les retours d'expérience des 10 territoires que dans toutes les évaluations conduites en 2020 : TZCLD a de la peine à attirer les jeunes. Les moins de 26 ans représentent 5% des bénéficiaires et les 43-61 ans représentent 58%, soit une sur-représentation de 50% par rapport à la population. L'EBE ne fait pas rêver les jeunes ! Le point est à approfondir, mais on peut imaginer que le RTE, par son adaptabilité, sa flexibilité, son caractère plus « individualisé » réponde mieux aux tendances de la société actuelle pour les tranches d'age avant 40 ans.


Une première ébauche d'un tel parcours pourrait être celle ci :

TZCLD et RTE 2.jpg


Les allers- retours sont possibles et même encouragés vers et depuis TZLCD : les statuts de l'EBE précisent que tout est fait pour encourager l'entrée vers des parcours de formation (EBE compris) ou vers tout « essai » que le titulaire du contrat souhaiterait tenter (intérim ou CDD marchand par exemple). Une simple suspension du CDI permet de revenir dans l'EBE à tout moment.

Soulignons à ce stade que l'accompagnement des salariés au sein de l'EBE reste un sujet dans le cadre de l'expérimentation. Les règlements d'application de la 2eme loi devraient notamment en préciser les conditions spécifiques de financement

B. Mettre en synergie les deux initiatives

Des rôles différents mais complémentaires

Les publics visés sont différents, dans la mesure où TZCLD vise avant tout à réinsérer socialement des personnes éloignées de l'emploi, ce qui n'est pas le but premier du RTE. Les premiers RTE servis s'adressent à des personnes ayant un projet, sinon personnel (mettre en place telle activité), en tout cas de société (s'impliquer dans le changement de la société).


Si TZCLD peut d'une certaine façon servir à murir un projet personnel en fournissant un environnement sécurisant pour tester une nouvelle activité, les conditions du retour de celle ci au secteur marchand ne sont pas expressément prévues. Il n'y a pas d'exemple connu pour le moment dans les EBE. On peut d'ailleurs se poser la question du devenir d'une activité devenue « rentable » au sein d'une EBE : doit elle bénéficier à une seule personne partant vivre sa vie dans le secteur marchand, ou cette activité doit elle rester dans l'EBE afin de financer d'autres activités déficitaires ? Le point mérite débat et n'est pas tranché à ce jour. Il est probable, compte tenu du caractère décentralisé de TZCLD, que la réponse soit à trouver au niveau du CLE concerné.


Le RTE au contraire peut s'adapter facilement à une telle « montée en rentabilité » d'une activité, par l'augmentation progressive de la contribution de cette activité à la CTE (mise en commun des gains et des pertes). Le statut d'entrepreneur salarié facilitera ensuite le départ (spin off) de l'activité vers une pépinière d'entreprise, si tel est le choix de l'entrepreneur et de la CTE. Une activité portée dans le cadre d’un RTE peut aussi avoir un effet démultiplicateur et générer d’autres activités viables.

De même, dans le cadre de l'EBE, on peut imaginer la personne ayant lancé l'activité devenir le référent de celle ci et former, dans le cadre sécurisant de l'EBE, de nouveaux embauchés ayant choisi cette activité, entrant ainsi dans un cycle de formation « par à pair » avec l'assistance de la structure de l'EBE pour aider aux conditions et à la qualité de la formation.


Une question se pose pour les activités nouvelles identifiées par le CLE : vaut il mieux les confier à l'EBE, ou les « monter » dans le cadre d'un RTE ?

Il est certain que le RTE a un caractère plus autonome que TZCLD. Aussi peut-on en première approche considérer que lorsque l'activité est fortement identifiée à une personne, et que celle ci recherche une certaine indépendance, alors le couple (activité , personne) pourra être dirigé vers un RTE.

Dans le cas contraire (activité identifiée indépendamment d'une personne) c'est bien évidemment l'EBE qui semblerait privilégiée.


La sécurisation des parcours du RTE par le passage de l'un à l'autre

le RTE ayant un caractère relativement individuel au niveau des activités et des initiatives, on peut s'attendre à ce qu'il soit plus à risque :

  • lassitude de la personne : la possibilité de changer d'emploi vers l'EBE peut être rassurante pour la personne, dans la mesure où elle sait qu'elle pourra demander à changer d'activité au sein de celle ci
  • activité insuffisamment rémunératrice : elle pourra trouver au sein de l'EBE un environnement plus favorable pour continuer son activité, avec l'aide d'autres salariés pour passer à une autre échelle.
  • activité se révélant impossible : la personne pourra toujours revenir vers l'EBE comme salarié

Mutualiser les investissements

Les investissements en matériel peuvent également être mis en commun entre les deux initiatives : le partage des locaux et des outils, ainsi que des charges fixes optimiserait leur utilisation.

Se posera alors la question des clés de répartition comptable. On peut assez facilement imaginer des règles prenant en compte le type d'activité, le nombre d'heures d'utilisation, les km parcourus,.. que ce soit par chaque EBE ou par des titulaires de RTE. La péréquation des charges et des revenus fait partie des règles du RTE, ce ne devrait donc pas poser de problème particulier, dans la mesure où une instance commune (le CLE) veille à une répartition équilibrée.

C. Mettre les structures en communs

Bien qu'aucun territoire n'ait à ce jour combiné les deux, il apparaît que dans tous les cas on va avoir besoin d'une structure de tutelle pour :

  • dans le cas du RTE héberger les « porteurs d’activités » (la CTE)
  • dans le cas de TZCLD mutualiser les moyens et ressources (notamment capitalistiques) entre les EBE.


Sur ce point l'expérience des 10 territoires a montré que les contraintes de management limitent la taille des EBE. Compte tenu de ce que les territoires ont des populations cibles de l'ordre de centaines de privés d'emploi, la création de plusieurs EBE va devenir un standard dans tous les territoires. Le besoin d'avoir une structure de mutualisation devient évident. Le choix des statuts de la structure « holding » facilitera également l’accès des collectivités au capital, ce qui n'est pas le cas pour les structures privées que sont les EBE (associations ou entreprises non SCIC).

Cette structure holding permettrait aussi de donner une existence légale au CLE, qui deviendrait, avec des aménagements pour la participation de représentants extérieurs à la structure, l'organe de direction de l'ensemble.


TZCLD et RTE .jpg


On peut ainsi imaginer que le CLE prenne en charge la régulation du RTE, selon des règles à fixer en fonction du territoire (concurrence avec d'autres emplois notamment). La participation des services de l'emploi au CLE permettra d’inscrire le RTE dans la politique de l'emploi local, au même titre que TZCLD.


Coté TZCLD, un tel schéma aurait également l'avantage de bien séparer les activités d'exploitation (l'EBE) de celles de mutualisation (la structure holding), et d'orientation (le CLE), et de clarifier les rapports entre EBE et CLE , l'EBE étant clairement dépendante du CLE. L’expérience actuelle montre que ces rapports peuvent devenir conflictuels, étant donné la contradiction entre exhaustivité (embaucher sans aucune sélection) et équilibre économique (qui tend à privilégier à l'embauche les personnes les plus employables).


La structure holding serait à caractère coopératif (SCIC, SCOP) de façon être un lieu de gestion démocratique. Ceci est tout à fait compatible avec le CLE, dans la mesure où le fonctionnement repose sur une représentation de toutes les parties prenantes, y compris des représentants des salariés et des privés d'emploi encore sur la liste d'attente.

C'est également compatible avec le caractère de Coopérative d'Activité et d'Emploi, qui est l'un des statuts préconisés pour la structure hébergeante dans le cadre du RTE.


KPA-Cité

L’histoire du réseau KPA-cité

KPA-Cité a été créé face aux enjeux et constats suivants

Les quartiers populaires concentrent des taux de chômage et l’inactivité très élevés. Les habitant·es de ces quartiers exercent parfois des occupations hors des emplois salariés qui ne sont pas reconnues, mais qui mobilisent néanmoins des compétences et produisent de l’activité et des essources au sein des quartiers.

Les compétences collectives et la capacité à « faire ensemble » sont recherchées et valorisées au sein des structures d’activité. Pourtant, au sein des dispositifs de formation classiques, elles sont largement laissées de côté au profit du développement des compétences individuelles.

En déployant l’entrepreneuriat coopératif dans des territoires où les inégalités socioéconomiques sont fortes, l’objectif est de permettre aux habitant·es de développer les compétences menant à leur autonomie professionnelle : accompagnement à la construction d’un projet professionnel vers l’emploi, à la création d’activité, développement de la confiance en soi. Le dispositif cible les personnes peu diplômées et éloignées de l’emploi et de l’entrepreneuriat. In fine, l’ambition du dispositif est de créer des activités économiques durables et de proximité, au sein de territoires déclassés. C’est un dispositif « d’éducation populaire à l’économie coopérative » qui s’appuie sur les principes de l’économie des Communs, selon lesquels la meilleure garantie de préservation de certaines ressources est une gestion partagée et négociée.

Un des enjeux identifiés est également de « dépasser les limites » de la Coopérative Jeunesse de Services (CJS). Existant en France depuis 2013, la CJS est une entreprise coopérative, au sein de laquelle un groupe de jeunes de 16 à 18 ans développe des services ou des produits pendant la période estivale qu’ils/elles proposent aux habitant·es et aux entreprises environnantes. Le dispositif KPA-Cité, quant à lui, a été pensé afin d’être le plus ouvert possible : c’est un réseau composé de petites entreprises coopératives qui a pour objectif d’accompagner toutes les personnes volontaires de 16 ans ou plus, sans limite d’âge, à s’investir dans des initiatives de long terme.

Les grandes étapes de développement

  • Création en 2017 : Porté par l’Association pour un Numérique Inclusif et Solidaire (ANIS), KPA-Cité est un projet créé en 2017. Il a été développé par Marion Rousseau et Simon Sarazin qui ont vécu en 2015 une expérience de Coopérative Jeunesse de Services (CJS) à Boulogne-sur-Mer.
  • Expérientation en 2017 : Le projet KPA-Cité s'est constitué à partir de 3 expériences fondatrices :
    • La Cape, le premier projet de KPA développé par Marion Rousseaux et Simon Sarazin à Roubaix (Juillet 2017) ;
    • Le projet porté par la Maison de quartier à Moulins avec Fanny Houssière, sa directrice (Mars 2018) ;
    • Le projet porté par l’association KPA La Rochelle avec Florine Jollivet (Mars 2019).
  • La première phase d’expérimentation, soutenue financièrement par le Fonds d’Expérimentation pour la Jeunesse en 2017, a permis de tester des activités économiques construites avec les habitant·es et les partenaires des territoires concernés. Ces activités ont été très variées : activités de conciergerie, animation d’ateliers pour enfants ou adultes sur les thèmes de l’environnement, de l’upcycling, du bien-être, activités de traiteur, de jardinage, d’assistance informatique...
  • Déploiement depuis 2019 :
    • De nouveaux partenaires se sont intéressés à la démarche et ont développé des émanations locales du programme à : Grande-Synthe, Arras, Boulogne sur-Mer, Coudekerque-Branche, Tours, Valenciennes, Onnaing, Nogent-sur-Oise…
    • À partir de 2020, KPA-Cité a échangé avec le réseau local et régional de Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée (TZCLD). À l’occasion de plusieurs rencontres, ont été identifiés les points communs dans les projets et les complémentarités qui pourraient se dégager sur certains territoires urbains. C’est ainsi que sont nées les premières synergies KPA-TZ en 2021. Les KPA de Valenciennes, Roubaix et Tours sont localisés sur des territoires où des entreprises à but d’emploi (EBE) du réseau TZCLD sont présentes.
  • 2022 - 2023 : Le projet a été soutenu par l’État dans le cadre de l’appel à projets « 100% Inclusion » : 11 KPA participants, avec un objectif de toucher 500 personnes
  • 2023 : Désormais KPA-Cité est un réseau réunissant une quinzaine de KPA, principalement situés en région Hauts-de-France. Ces émanations locales du dispositif se trouvent majoritairement dans des quartiers urbains qui cumulent des fragilités économiques et sociales fortes. Les taux de pauvreté y sont élevés, le niveau de diplôme et surtout le taux d’activité des 15-64 ans sont faibles.

Le fonctionnement et les acteurs à l'échelle du réseau KPA-Cité

Les 14 KPA, émanations locales du dispositif KPA-Cité, fonctionnent en réseau

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Le dispositif Kpa-Cité est porté par : l’Association pour un Numérique Inclusif et Solidaire (ANIS et Catalyst) et Optéos, Coopérative d’Activités et d’Emploi, pour la durée du financement 100% Inclusion. La coordination, le suivi global et l’animation du réseau sont assurés par des coordinateurs/rices travaillant au sein de Coopératives d’Activité et d’emploi (Optéos et Tilt).

Des temps Inter-KPA : des temps de rencontres et d’échanges trimestriels permettent aux KPA de travailler collectivement les différents aspects de la vie des KPA (accompagnement des coopérant·es, création d’activités économiques, outils de capitalisation…), de faire le point sur le déploiement de leurs actions, et de partager et produire des ressources communes.

Le partage de ressources : en dehors des temps Inter-KPA, les parties prenantes des KPA sont également invitées à partager leurs ressources, compétences et connaissances aux autres KPA, qui peuvent ensuite les mobiliser pour créer des initiatives plus rapidement. Ce partage et cette documentation se font principalement sur le wiki et le forum du réseau, mais également sur le site internet et le drive du réseau.Un accompagnement à la création de KPA : les acteurs/structures souhaitant mettre en place un KPA peuvent être accompagnés par le réseau.

Des acteurs partenaires échangent et collaborent avec les KPA et le réseau

  • SOUTIENS FINANCIERS (collectivités locales, fondations privées)
  • PARTENAIRES PRESCRIPTEURS (Mission locale, Centre social, association locale…)
  • PARTENAIRES FORMATEURS (professionnel·les, acteurs de l’entrepreneuriat…)

Le fonctionnement à l'échelle d'un KPA

Chaque KPA fonctionne comme une entreprise co-portée par une structure associative (qui pilote le KPA, gère les subventions et rémunère les accompagnateurs/rices) et une structure de portage juridique et financier (qui porte les contrats CAPE, apporte un soutien comptable, financier et administratif, et rémunère les coopérant·es).

Publics cibles : Les KPA acceuillent les personnes volontaires de 16 ans ou plus n’exerçant pas d’activité professionnelle reconnue, souvent peu diplômées et éloignées de l’emploi et de l’entrepreneuriat, dans des territoires où les inégalités socioéconomiques sont fortes.

Les personnes qui rejoignent un KPA, les « coopérant·es », bénéficient d’un Contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE) pour Les coopérant·es expérimentent différentes activités économiques au sein d’un KPA, tout en conservant leur précédent statut et leurs minimas sociaux. C’est un outil de droit commun, utilisé comme levier à une démarche de soutien à l’insertion socio professionnelle. Les coopérant·es suivent une logique de parcours avec des étapes clés (s’immerger, explorer, tester et s’ouvrir vers l’extérieur). Ce parcours peut aller jusqu’à 3 ans (durée maximale du CAPE).


Les coopérant·es expérimentent différentes activités :

  • Au sein du KPA, ils/elles expérimentent l’entrepreneuriat collectif, s’initient aux principes de la contribution et de la répartition collective, découvrent des activités et des métiers…
  • En dehors, ils/elles conçoivent et réalisent des prestations pour des clients/usagers, en lien avec leurs intérêts. Les coopérant·es créent ainsi leurs propres activités rémunératrices.

Au sein d’un KPA, chaque coopérant·e est accompagné·e dans son parcours à titre individuel, mais l’accompagnement se veut également collectif afin de développer l’activité économique commune. Cet accompagnement est réalisé par des « contributeurs/rices », mais également entre pairs. Les coopérant·es peuvent aussi devenir contributeurs/rices.Les contributeurs.ices ont pour missions de :

  1. Coordonner les activités du KPA et animer le collectif ;
  2. Imaginer la création d’activité aux côtés des coopérant·es ;
  3. Accompagner les coopérant·es à la montée en compétences (psychosociales, professionnelles, entrepreneuriales…) et à la construction de leur parcours professionnel ;
  4. Accompagner les coopérant·es dans l’accès aux droits, à la santé, au logement…

Les contributeurs/rices ne sont pas des acteurs spécialisés en insertion socioprofessionnelle, mais des entrepreneur·es salarié·es ou des bénévoles qui accompagnent différemment selon leurs compétences et leur expérience.Les activités de production de biens ou de services doivent respecter les principes de l’Économie Sociale et Solidaire : l’objectif est de créer des activités utiles aux territoires et à leurs habitant·es (adaptation et articulation aux spécificités des territoires), respectueuses de l’environnement (des activités fortement territorialisées, des circuits courts de consommation), et créant des liens sociaux. Les activités des KPA doivent par conséquent s’inscrire dans une dimension de long terme afin de favoriser l’appropriation par les habitant·es et les coopérant·es des ressources, des initiatives et des espaces.Si les KPA sont déployés selon les principes communs précédemment énoncés, chaque KPA est autonome et développe une identité, des activités et un fonctionnement propres, au regard de son territoire d’implantation, des besoins et caractéristiques des publics, des opportunités ou encore des ressources et partenaires disponibles.

  • Les différentes structures :
    • La structure d'accueil :Tiers-lieu, fablab, incubateur... Ces structures (et leur localisation) influencent les liens que les KPA peuvent avoir avec différents acteurs du territoire
    • La structure porteuse : Association jeunesse (ou dédiée au projet), Centre social, Maison de quartier
    • La structure en charge du portage juridique : Une CAE, une couveuse d’entreprise ou, pour 2 KPA, l’association en propre.
  • Les types de publics : Le modèle KPA est ouvert à toutes les personnes de plus de 16 ans qui souhaitent le rejoindre. Certains KPA se sont spécialisés :
    • Les KPA de Tours et La Rochelle accueillent uniquement des jeunes.
    • Le KPA de Roubaix travaille prioritairement avec des femmes isolées
  • Les contrats : Le contrat de base sur lequel s’adosse le KPA est le contrat CAPE. Dans certains KPA, les coopérant·es peuvent être en CESA, en volontariat, ou bénévoles adhérent·es à l’association (ex : au centre social
  • La durée des parcours : La durée des parcours des coopérant·es peut varier selon les KPA. Par exemple, elle est de maximum 1 an au sein des Coopains à Bord et de maximum 2 ans à Rhizome ou Coop’ Manau.
  • Les activités économiques : Les activités économiques, construites avec les habitant·es et partenaires des territoires, sont variées selon les KPA : Traiteur, jardinage, cantine, service de conciergerie, réparation de vélos, tourisme solidaire, service numérique aux habitant·es, couture, upcycling, friperie…
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